• Le Prince des Jeep

    Il était une fois un dix-huit trous stupéfiant tenu dans les fabuleux paysages tilleul et trèfle de l'Irlande sauvage. Là sur le terres du vieil O'Neill, le peuple des Cloches didindonguait paisiblement, régnant sans partage dans une forêt cacaotée sur les vaches qui produisaient du doux lait, et les lapins qui cachaient des œufs en chocolat partout sur le green.

    Il fut un temps où le Chef des cloches était un véritable fils de fonte complètement carillonné. Il estimait qu'il y avait trop de lapins dans la région, et il n'était pas question que le O'Neill finisse comme l'Australie. Non content que les lapins soient traités en esclaves et doivent déjà construire de hauts clochers de carnaval où étaient suspendues les cloches à la fin de leurs jours pour que leurs âmes tintinnabulent à jamais dans le vent et porte le beffroi et la crainte dans le cœur des ennemis, ce vilain Chef des cloches demanda à ce que tous les petits lapins mâles soient tués et transformés en civets.

    Au fin fond d'un terrier, Madame Lapin venait de donner le jour à cinq filles et un petit garçon. Elle ne pouvait se résoudre à le voir finir en civet. Alors se moquant de l'ironie du sort, elle cacha son petit dans une vieille casserole à fond fendu, et mettant le tout dans un panier d'osier, elle le laissa aller dans le caniveau qui traversait les terres du O'Neill. Le petit lapin vogua donc comme ça. Mais les cris du lapinou dans sa casserole alertèrent des cloches qui passaient par là. L'un de ces cloches étaient la fille du Chef des cloches en personne. Voyant la petite casserole elle en devint tout de suite fêlée car elle n'avait pas d'enfants. Bien que cette casserole soit très laide, et malgré les désaccords de tous, elle l'adopta, et la baptisa Moché, parce que bon quand même fallait pas déconner, qu'est-ce qu'elle était moche. Moché fut ainsi élevé comme un Prince, avec son cousin Phare à Onde l'héritier du trône. Moché était responsable des Jeep et des voiturettes sur le golf (de marque Jeep, Moché avait négocié le contrat), c'est lui qui avait eu l'idée d'installer des couvertures sur les fauteuils des dix voiturettes. Phare à Onde arriva bientôt au pouvoir. Moins violent que son père, il n'en régnait pas moins d'une main de fonte, et pour beaucoup parfois sonnait le glas précocement dans une vie de misère. Phare à Onde aimait beaucoup traîner sur les remparts avec son cousin, à mater les jolies clochettes avec leurs courbes en cloches très lois gaussiennes. Certaines étaient parfois en tenues affriolantes, en gaines moulantes, même que Phare à Onde s'écriait alors : « Crois-tu que mon golf vaut sa gaine ? » et comme son cousin captait pas la blague il la répétait avec des accents bizarres.

    Mais un jour qu'ayant bu un verre de trop en se tapant la cloche Moché draguait une cloche à fromages, celui-ci tomba malencontreusement de sa casserole, et devant toute la noblesse des clochers, il s'avéra que celui-ci n'était qu'un de ses foutus lapins ! Phare à Onde était fort peiné. Il lui fallait prendre une dure décision. Son édit fut sans appel :

    « Nous avions toujours cru savoir qui tu étais, tu avais tes papiers Moché, prince des Jeep, tu vas aller te faire voir ailleurs. »

    Car il l'aimait trop pour le condamner à mort (et qu'il aimait bien glisser un jeu de mots débile en toutes circonstances). En traversant le dix-huit trous, évitant de peu les volées de cloches, Moché ressentit aussi les regards moqueurs des lapins. Seul, il se sentait seul.

    Quelques semaines plus tard dans le Connemara, un fan de Sardou s'allumait une cigarette en vantant à sa chérie la beauté du paysage. « Terre brûlée au vent, des landes de pierre, autour des lacs, c'est pour les vivants, un peu d'enfer, le Connemara. » Quant à sa chérie, elle essayait de se tenir à l'écart de cet enfer en marchant au loin clope au bec. Elle laissa tomber son mégot dans un buis qui s'enflamma alors, tandis que n'ayant remarqué du tout, elle s'écriait pensant à son amant : « Libère-moi mon lapin ! »

    A quelques centimètres plus bas, Moché s'étonnaient déjà pas mal : « tiens, les buis sont ardents par ici », mais en plus une voix venait de très loin qui faisait « Libère mes lapins » avec une autre qui tambourinait un « pam pam pam papapapam »...

    Moché ne se le fit pas dire deux fois, il repartit vers le O'Neill !

    Il frappa directement à la porte du conseil des ministres des cloches que dirigeait son cousin :

    - Que viens-tu faire ici ? s'écria ce dernier. N'es-tu point heureux que déjà je t'aie laissé la vie sauve.
    - Phare à Onde, oui tu m'as laissé la vie sauve, mais combien d'autres vies tu opprimes ? regarde le monde qui est le tien ! où est la justice sociale ?
    - Mais que veux-tu Moché ?
    - Plus de justice Phare à Onde : let my people golf !

    Phare à Onde jeta un regard complice à ses ministres... quelques secondes après, il courrait après Moché avec une machette. Celui-ci connaissait bien les lieux il s'enfuit jusqu'aux voiturettes. Phare à Onde arriva à ton tour, mais il se prit les pieds dans les couvertures et se fracassa contre un mur. Phare à Onde prisonnier des dix plaids des Jeep s'avoua vaincu : « Tu as une nuit pour t'enfuir avec tous les lapins ! »

    Moché ne se le fit pas redire !

    Le lendemain matin, alors qu'il se remettait mal de son incident de la veille, Phare à Onde reçut la visite de son ministre des affaires lactées. Ce dernier avait une bien triste nouvelle : les lapins étaient partis avec la vache et son veau !!!

    « Meuh veau les rattraper !!!! » s'écria Phare à Onde... et son ministre préféra ne pas répondre, parce qu'après sa blessure aux orteils, Phare à Onde était devenu plutôt bancal et cloche-pied.

    Les lapins étaient arrivés aux abattoirs Label Rouge bien décidés à vendre les vaches pour se payer un billet en bateau vers la terre promise : l'Australie ! Ils avaient déjà tiré un bon prix de la vache quand un bruit de cloches commença de les étourdir : Phare à Ondes et toute son armée arrivaient !!! Moché eut une idée, il appela lui Guillaume un lapin sanguinaire et arbalétrier de surcroît ! « Mon ami », lui confia-t-il, « tu as toujours voulu tuer, et tu as un mobile... alors Guillaume, téléphone et qu'après plus jamais rien ne sonne ! »

    Et tous les autres de courir très vite vers la sortie, montés sur leur veau, pour la traversée du Label Rouge. Resté seul avec son arbalète, Guillaume, kamikaze lapinou et tout doux, visa la pomme de douche du système de nettoyage des abattoirs et la fit exploser : dans les minutes qui suivaient tout était noyé. Plus aucune cloche ne sonnait, même pas en mode vibreur.

    Les lapins arrivèrent dans le désert du Connemara, et le veau n'arrêtait pas de pleurer. Et ils n'en pouvaient plus, et tombaient les uns après les autres, tels des Irlandais affamés. Quand tomba la nuit, le veau tomba de sommeil. Les lapins alors adorèrent : le veau dort et le calme remplit la plaine.

    Je parle, je parle, mais si jamais, il vous serait arrivé d'avoir déjà eu un autre son de cloche de la même histoire, ce serait bien de m'en raconter la fin.


     


  • Commentaires

    1
    Vendredi 21 Mars 2008 à 16:55
    Note de l'auteur
    certains (des lecteurs assidus) ne seront pas sans se demander pourquoi les cloches faisaient construire des "hauts clochers de carnaval" et bien sache lecteur assidu, que si tu ne le sais pas encore, c'est que j'ai complètement zappé de le raconter.
    2
    Vendredi 21 Mars 2008 à 16:56
    Note de l'auteur (2)
    alors bien sûr je pourrais profiter que personne deux minutes après publication ne lit ce blogg pour ces textes mais juste pour sa bédé (qui serait parait-il fascinante prenante et trop bien dessinée) pour changer le texte ni vu ni connu. Mais je suis un canard honnête moi.
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    3
    Vendredi 21 Mars 2008 à 16:57
    Note de l'auteur (3)
    alors sinon, pourquoi des clochers de Carnaval ? hé bien c'est parce que dans le O'Neill ils sont célèbres les clochers déguisés...
    4
    Vendredi 21 Mars 2008 à 16:58
    Note de l'auteur (4)
    ça valait bien un auto-commentaire bien lourd...
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